L'Economie
Entre Covid et accord-cadre

Les métiers de la CONSTRUCTION ont sorti leur épingle du jeu

Pour Georges Zünd, directeur de la Fédération vaudoise des entrepreneurs, le secteur a globalement fait face lors des dix-huit derniers mois, malgré quelques complications.
© ARC Jean-Bernard Sieber

Georges Zünd dirige la faîtière vaudoise de la construction.

© ARC Jean-Bernard Sieber

Georges Zünd, vous dirigez la faîtière de la construction. Comment se portent vos membres, selon vous?
Il y a toujours des cas isolés qui souffrent, mais globalement, nous avons fait face et dès les premiers jours, nous avons formé une sorte de front commun avec les syndicats et le Conseil d’État, en disant que tous ceux qui étaient en mesure de garantir le respect des mesures sanitaires pouvaient poursuivre leurs activités sur les chantiers, les autres étant soumis au régime des RHT. Ce cap clair donné par toutes les parties a peut-être permis à la construction de passer ce moment sans trop de vagues.

Mais pendant ce temps, le reste de l’économie était en confinement et en télétravail!
En effet! Le rythme a peut-être été un peu ralenti du fait du respect des distances, du masque ou de la limitation du nombre de passagers dans les véhicules, mais nous avons très tôt eu une approche pragmatique en préconisant et surveillant l’aménagement des chantiers ou sites de travail avec la pose de w.c., de points d’eau ou la mise à disposition de solution hydroalcoolique. Nous avons aussi multiplié les contrôles sur place pour nous assurer que les mesures étaient prises. Tout n’a pas été parfait, mais nous avons fait le maximum pour être en règle et assurer la continuité des mandats.   

C’est presque une vision idyllique, mais n’y a-t-il pas des entreprises qui ont fait faillite ou qui ont restructuré?
Ce n’est pas l’indication que j’ai pour l’heure, en effet. Il est difficile d’avoir une vision précise.  À ce jour, la Caisse de compensation AVS de la Fédération ne nous rapporte pas d’informations sur la mise à l’arrêt de personnel en raison de l’arrêt ou de faillites de PME. Il n’y a presque rien à signaler, même s’il est plus prudent d’attendre 2022 pour y voir plus clair sur cette question qui se pose légitimement.

Quel fut le plus grand problème jusqu’ici?
Pour certains métiers, le problème principal au départ est que nous avions les matières premières et le matériel, mais que la clientèle ne voulait pas voir le menuisier ou le peintre à l’intérieur des appartements, ce qui est compréhensible. Et maintenant qu’on nous sollicite pour faire des transformations, c’est le matériel qui manque en raison de la pénurie. Mais dans l’ensemble et surtout par rapport à d’autres professions, on ne peut pas se plaindre, sachant qu’une écrasante partie de nos activités se déroule en extérieur durant les douze mois de l’année.

Le Covid-19 a-t-il accéléré certains de vos projets?
Notre objectif principal est de simplifier la tâche de nos 2700 membres, soit 22’000 collaborateurs, et nous avons par exemple mis en place un partenariat avec le Groupe mutuel, la Vaudoise assurances et la Banque cantonale vaudoise afin que ceux-ci trouvent rassemblées auprès de nous toutes les prestations administratives dont ils ont besoin.

Un charpentier doit passer l’essentiel de son temps à établir des projets, monter un toit et animer ses équipes, pas devant un ordinateur pour gérer l’administratif et les assurances. Ces collaborations vont clairement dans le sens de cette simplification si importante, mais pas toujours évidente dans les faits.

 

Tout le monde a fait l’éloge de son boucher et du commerce local durant la pandémie. Est-ce pareil au niveau de la construction où les petits artisans sont soumis à une rude concurrence?
Il est trop tôt pour le dire, mais nous avons profité de cette période pour lancer la campagne «Construire vaudois». Il faudra plusieurs années pour faire changer les mentalités et faire comprendre que le prix n’est pas tout. Quand on rénove sa villa, il est important de tenir compte du contact avec l’entrepreneur, du service après-vente, de son implication dans la région. Consommer local doit devenir un réflexe dans tous les domaines, mais je crains que la seule pandémie ne suffise à changer toutes les habitudes du passé.

En quoi est-ce utile d’être membre de votre fédération?
C’est une bonne question. Ceux qui en doutaient ont pu voir que nous avons été présents presque sept jours sur sept pour rassurer les entrepreneurs et les aider dans la gestion de problèmes qui ne s’étaient souvent jamais posés, comme les prêts Covid, les RHT ou la législation. Nous avons eu de très bons retours et beaucoup de membres ont pu voir que notre palette était très large.

Maintenant que l’économie reprend, vous êtes confrontés à la pénurie de matériaux et à la hausse des coûts. Cela vous inquiète?
Non! Il s’agit d’un rééquilibrage logique, car les prix ont «trop» baissé depuis des années. Cet épisode est embêtant, mais compréhensible. Je ne pense cependant pas qu’il sera durable et nous avons déjà des signes d’un retour à la normale vers la fin de l’année.

Quel est le défi à relever pour les métiers de la construction, alors que le développement sans limites est freiné, ne serait-ce que par la loi sur l’aménagement du territoire ou le blocage des zones constructibles?
Nous allons ouvrir un chapitre passionnant, avec de nouveaux métiers puisqu’il faudra songer à de nouveaux matériaux, à leur recyclage dès la construction. Nous venons d’ouvrir un centre de formation continue à Echallens, car il y aura de nombreux défis, mais des opportunités aussi. Construire mieux, construire plus intelligent. J’espère que ces enjeux vont séduire les jeunes à qui il faut répéter sans cesse que nos métiers seront de plus en plus attractifs pour la relève, avec une technologie de plus en plus présente dans les projets.