Patrimoine vaudois
L'héritage du XXe siècle

La basilique du Valentin, trois églises en une

À l’ombre de la cathédrale de Lausanne, la basilique Notre-Dame du Valentin sort d’une longue restauration de son enveloppe extérieure. Désormais, les restaurateurs se concentrent sur l’intérieur de l’édifice et sur une fresque classée parmi les chefs-d’œuvre de Gino Severini.
ARC - JB Sieber

Eric-James Favre-Bulle, restaurateur en chef de la basilique Notre-Dame du Valentin.

ARC - JB Sieber

ARC - JB Sieber

La restauration de l’intérieur de l’édifice est en cours.

ARC - JB Sieber

ARC - JB Sieber

Léo Borgatta, conservateur-restaurateur de l’Atelier Saint-Dismas, travaille sur la suppression du vernis 1976 par application de papier Japon imbibé de solvant sur la fresque de Gino Severini.

ARC - JB Sieber

ARC - JB Sieber
ARC - JB Sieber
ARC - JB Sieber

Surplombée par la colline de la Cité et sa cathédrale, la basilique Notre-Dame de Lausanne, première église catholique dans le canton de Vaud, est plutôt discrète sur son petit promontoire. Construite par l’architecte Henri Perregaux entre 1832 et 1835, l’église a connu plusieurs transformations depuis sa création. La principale, datant de 1934, fut marquée par la transformation de la façade principale, l’ajout d’une travée à la nef et la construction d’un clocher en béton d’une hauteur de 38 mètres.

Ces travaux d’agrandissement furent effectués par le Groupe de Saint-Luc auquel appartenaient l’architecte Fernand Dumas et le peintre Gino Severini, auteur de la grande fresque mariale de l’abside. Il s’agit d’un chef-d’œuvre de l’art sacré, où une Vierge aux traits byzantins se profile sur un fond d’or, dans un décor où l’on aperçoit la cathédrale, le château Saint-Maire et la tour Bel-Air. Dans les années 70, un nouveau chantier fut lancé pour adapter la basilique aux nouvelles directives liturgiques de Vatican II visant à ouvrir les célébrations au monde moderne et à la culture contemporaine.

Soins rapides
Au début des années 2000, même si elle était moins dégradée que la cathédrale, la basilique du Valentin n’en réclamait pas moins des soins rapides: «Le clocher présentait toutes les altérations habituelles du béton, et des fragments de maçonnerie tombaient des claires-voies de la chambre des cloches dans les rues», explique l’architecte Christophe Amsler, chargé de la restauration de l’église.

La paroisse décida d’entreprendre alors de grands travaux à l’enveloppe de l’église, au clocher, à la nef et à sa couverture. Cette étape étant terminée, les travaux peuvent désormais se poursuivre à l’intérieur de la basilique qui souffre d’obsolescence technique et de vétusté généralisée.

 

Mais surtout, il s’agit maintenant de s’attaquer à la réhabilitation des décors intérieurs de la basilique et de trouver la plus belle manière de les faire exister. «Il faut s’imaginer que dans l’église actuelle, il y en a trois, comme enchâssées les unes dans les autres, précise Christophe Amsler, chacune cachant successivement celle qui la précédait». Finalement, l’idée retenue aujourd’hui est de les faire réapparaître toutes les trois et de les faire, pour la première fois, dialoguer entre elles: «Chaque décor est un témoignage de la profondeur liturgique, théologique, mais aussi monumentale de l’église. Chaque état manifeste l’évolution du sentiment religieux, entre l’approche néoclassique de Perregaux, la foi sombre et lourde des années 30 et celle portée par Vatican II dans les années 70. La difficulté est de trouver le juste moyen de les faire enfin dialoguer.»

Retrouver la lumière
Désormais, tout est entre les mains des restaurateurs et de leur savoir-faire. «Les décors sont peints les uns sur les autres, mais, par bonheur, la superposition des couches n’est pas une fatalité, explique Christophe Amsler. On peut toujours supprimer une peau pour faire réapparaître une couche sous-jacente. Mais, en l’occurrence, la restauration actuelle va se surajouter aux étapes précédentes. Nous n’allons pas sacrifier une peau pour en révéler une autre. Au contraire, nous allons en ajouter une supplémentaire.»

Restaurateur en chef de la basilique, Eric-James Favre-Bulle explique comment les travaux débutés en février dernier visent d’abord à supprimer les importants dépôts poussiéreux et crasseux ainsi que le vernis passé en 1976 sur l’ensemble de la fresque du chœur et de la dorure du cul-de-four: «Ces opérations – très délicates et compliquées par endroits – entraînent de nombreuses et passionnantes interrogations sur le maintien ou la suppression des surpeints qui masquent la fresque.»

Le travail sur l’œuvre de Severini sera achevé en juillet de cette année. Le chantier de la basilique s’étendra jusqu’en 2024, en se poursuivant d’abord dans la nef, puis dans le massif oriental. «Alors l’église aura retrouvé sa clarté», conclut Christophe Amsler.