Prêcher est une bonne chose, sauf si c’est dans le désert. Autrement dit, un label d’excellence est certes utile, mais à la condition qu’il puisse s’exprimer dans un environnement fertile et porteur pour ceux en attendent le plus: les entreprises. On parle également souvent de retombées, lorsqu’on évoque par exemple un grand événement sportif ou culturel, voire d’emplois indirects quand une grande multinationale s’installe dans une région, forte d’encouragements fiscaux.
Entre bien d’autres choses, c’est le rôle du statisticien que d’apporter un regard objectif et froid, celui des chiffres. Et il suffit de se pencher ceux présentés courant avril autour du produit intérieur brut vaudois pour se convaincre que le canton cumule des atouts non seulement à l’échelle du pays, mais également en comparaison internationale.
Tout commence pourtant – quand on regarde les graphiques – par un sérieux coup de froid (on croit presque à une erreur) en 2009. «Il s’agit tout simplement de la crise financière mondiale, qui a eu des répercussions partout, y compris dans le canton de Vaud», rappelle utilement Marc-Jean Martin, de Statistique Vaud. C’est la suite qui est intéressante à analyser avec la reprise immédiate de la Suisse et du canton, qui est resté plus performant en termes de PIB, d’emploi et de population, bien qu’il n’ait plus bénéficié de l’implantation et du développement d’entreprises d’envergure comme auparavant.» Cela illustre bien le potentiel de ce phare au milieu de l’Arc lémanique, globalement considéré comme une entité unique par les milieux économiques, et qui provoque sans doute une émulation plus forte que les cantons voisins. «Il y a toujours un nombre de créations de nouvelles sociétés plus grand qu’ailleurs», constate Christophe Reymond, directeur du Centre patronal, en guise de traduction de la statistique au terrain. «L’expérience montre que ce dynamisme est propre au canton de Vaud, qui offre des conditions positives pour qui veut se lancer. L’esprit d’entreprise est une réalité, mais il s’agit le plus souvent de PME.» Si elles sont le véritable poumon de l’économie, Christophe Reymond souligne aussi le fait que «nous ne comptons aucun poids lourd comme des géants de la construction, occupant plusieurs milliers d’employés.»
Une situation également relevée par le statisticien, comme une médaille à deux faces. De Vevey à Aubonne, on peut citer quelques multinationales qui comptent plusieurs centaines d’employés (parfois plus de mille pour certains cas isolés); mais si l’on excepte le fabricant de périphériques mobiles Logitech, né dans le village d’Apples, pour devenir une référence internationale dans son domaine, le campus lausannois n’a pas encore engendré de géant mondial et global incontournable comme Google ou Facebook. «C’est le rêve de certains, mais on peut aussi dire que la multiplicité des acteurs est également une chance pour le canton de Vaud, car quand survient un revers de fortune (NDLR: comme la faillite ou la délocalisation d’une grosse société), l’équilibre général permet de faire face et ne pas impacter l’économique d’une région dans son ensemble», explique Marc-Jean Martin.
Une situation qui fait immédiatement penser à la récente décision du constructeur automobile japonais Honda de fermer son usine de Swindon au Royaume-Uni en 2022, une menace pour les 3500 personnes qui vont se retrouver sans emploi; et un casse-tête à l’échelle du pays, qui lutte chaque jour contre le chômage.
Le ciel vaudois est-il pour autant à l’abri des nuages? «Selon les estimations d’avril 2019, le PIB vaudois s’est élevé à 56,9 milliards de francs en 2018 et représentait alors 8% du PIB national. Les prévisions tablent sur une croissance du PIB vaudois un peu plus rapide que la croissance suisse selon les prévisions établies par le Créa: +1,6% contre 1,3% pour 2019 et +1,9% contre +1,4% pour 2020», détaille Marc-Jean Martin.
Si l’on ajoute qu’entre 1997 et 2018, le PIB vaudois a enregistré une croissance réelle moyenne supérieure à celle de la Suisse avec +2,4% par an contre +1,9%, on se rend compte que l’environnement cantonal est objectivement propice à la bonne santé des entreprises, qui semblent donc avoir intérêt à porter haut la marque VAUD+.