L’Université de Lausanne, outre son plan stratégique 2017-2022, a anticipé l’intégration du numérique dans ses cours. «Ce plan s’inscrit dans la continuité de notre activité. Il représente sans aucun doute une stimulation pour nous, susceptible de catalyser notre travail, de lui donner un coup d’accélérateur», souligne en préambule Giorgio Zanetti. «Cela légitime nos efforts. Nous voyons que l’État va se donner les moyens de ses ambitions. Pour nous, c’est important que cela soit une priorité du gouvernement à tous les niveaux de l’enseignement. C’est une volonté politique importante. C’est aussi une injonction de nos autorités et nous aurons des comptes à rendre.»
Aujourd’hui, toutes les facultés sont concernées par le numérique et à double titre. Il s’agit d’une part de tirer profit des outils numériques pour enseigner, de l’autre d’enseigner le numérique. Si les étudiants sont en général de très bons utilisateurs des outils, ils ne savent en revanche souvent pas comment ça fonctionne. Lorsqu’il s’agit de faire des recherches, ils ne sont pas toujours conscients que, derrière, il y a des algorithmes. Ils ne sont pas des connaisseurs en profondeur et ils manquent d’esprit critique face aux outils. Ils ne sont pas forcément plus alertés que la population générale des risques liés aux données personnelles, en fait. De plus, ils ne mesurent pas tous les enjeux sociétaux de la numérisation », souligne Giorgio Zanetti. Pour Catherine El Bez, responsable du projet MOOC UNIL (lire encadré), «il faut aussi réfléchir à l’employabilité des étudiants. Savoir utiliser les outils, c’est bien, mais ce dont ils vont avoir besoin, c’est d’un esprit critique, de la capacité à évaluer la pertinence et la qualité des informations, pendant les études et après».
Les outils
Depuis 10 ans, les exemples d’utilisation des outils du numérique comme supports de cours se multiplient dans toutes les facultés de l’UNIL. «Pour autant que le numérique représente une plus-value, les enseignants disposent de moyens confortables pour mettre en œuvre leurs projets», souligne Catherine El Bez.
Grâce au Fonds d’innovation pédagogique et aux ingénieurs pédagogiques de chaque faculté, les enseignants qui le souhaitent peuvent être accompagnés et soutenus dans l’élaboration de projets innovants. Les sciences criminelles ont par exemple mis en place une plateforme sur les incendies qui permet de regrouper toutes les sources, ce qui ne pourrait pas se faire sans l’informatique. En psychologie, des étudiants développent des tests en collaboration avec des informaticiens. Le domaine de la finance s’est numérisé depuis longtemps, comme les sciences humaines et sociales.
Entre autres outils, on peut citer Moodle, une plateforme d’apprentissage destinée à fournir aux enseignants, administrateurs et apprenants un système pour créer des environnements d’apprentissages personnalisés. Chaque enseignant peut y déposer ses documents en libre accès pour les étudiants ou proposer des activités pédagogiques en ligne. L’UNIL a aussi mis en ligne un module d’autoformation sur le plagiat pour sensibiliser les étudiants.
Compétences numériques
Le deuxième aspect, c’est l’enseignement des compétences numériques telles que la pensée computationnelle. «Il s’agit d’aider les étudiants à réfléchir en termes d’algorithmes. Un groupe de travail réunissant toutes les facultés se penche sur les manières d’aider les étudiants à acquérir les compétences transverses nécessaires, à la fois techniques et critiques, par rapport à la numérisation et à ses enjeux, de manière à proposer des offres complémentaires aux cours existants. La réflexion devra se mener filière par filière, de manière à tenir compte des besoins de chacune», souligne encore Catherine El Bez.
Il est trop tôt pour estimer ce que le Plan stratégique peut faire évoluer et comment. «Depuis 2003, l’UNIL ne compte plus de faculté des sciences et l’informatique est passée dans le giron de l’EPFL. L’informatique n’existe plus en tant que telle, mais les compétences ont continué à survivre. Nous avons des experts très pointus dans de nombreux domaines, par exemple en économie, en biologie, en géo-sciences ou dans les humanités numériques. Il y a une diffusion du numérique, mais les compétences ne sont pas centralisées comme avant», commente le vice-recteur. «Une première étape sera de dresser un état des lieux. Est-on à jour, faut-il en faire plus, pour quels étudiants, dans quels domaines? Les réflexions sont en cours. La question centrale réside dans le fait que les gens soient bien armés pour évoluer dans la société numérisée», conclut Giorgio Zanetti.