Plateforme 10/2019
Quartier des arts, acte 1

À côté, bientôt le chantier de la gare

Agrandissement des quais, transformation de la place, des quartiers voisins: d’ici dix ans, un nouveau centre urbain va émerger. Plateforme 10 n’en est qu’une première étape.
ARC Jean-Bernard Sieber

La place de la Gare va au-devant de transformations. En 2026, 200'000 personnes y transiteront chaque jour.

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Les quais de la gare de Lausanne seront allongés à 430 mètres et la grande marquise également prolongée.

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«Nous aurions souhaité pouvoir tout inaugurer en même temps, la place de la Gare, la gare agrandie, les musées et le reste», regrette Emmanuel Ventura, architecte cantonal. Hélas, il y avait trop d’acteurs à divers échelons, du communal au fédéral, et aux échéances décalées. Plateforme 10 n’ayant pas attendu les travaux que vont mener les CFF, «on risque de vivre pendant quelques années avec des solutions encore provisoires.» 
La transformation majeure, c’est celle de la gare elle-même. D’ici quelques années, les quais seront allongés à 430 mètres. La grande halle sera elle aussi plus longue, augmentée d’environ 90 mètres en direction de Plateforme 10. Il n’y aura plus deux, mais trois passages sous voies. Ce chantier s’inscrit dans le cadre de Léman 2030, un projet visant à adapter les infrastructures à l’augmentation du trafic ferroviaire. On estime notamment que d’ici dix ans, plus de 100'000 voyageurs circuleront chaque jour entre Lausanne et Genève, deux fois plus qu’aujourd’hui. Léman 2030 représente un investissement de près de quatre milliards de francs répartis sur l’arc lémanique. 
Dans la foulée, la place de la Gare est elle aussi transformée. Là, c’est un projet de la Ville de Lausanne; mais, comme il faut refaire tous les espaces souterrains, les CFF piloteront les travaux avec l’État. Dans la foulée, la zone située à l’est de la gare, la Rasude, d’une surface comparable à celle de Plateforme 10, va être reconstruite. De ce côté-là, le projet est privé. Et pour compléter le tout, des bâtiments seront remplacés, sous-gare, et les aménagements publics fortement modifiés avec la création d’une zone piétonnière au boulevard de Grancy. 
Le calendrier doit être précisé cette fin septembre par les CFF. Or l’ex-régie fédérale attend l’autorisation de construire. Les CFF effectueront les transformations de la gare de Lausanne par étapes, avec des mises en service de ses principales fonctionnalités tout au long de la décennie à venir. 

Plus complexe que le Flon
Tout le périmètre, que ce soit à la Rasude, à Plateforme 10 ou sous-gare, connaîtra des rez-de-chaussée animés et une forte orientation piétons. Zones piétonnes, espaces conviviaux, c’est donc un large et nouveau pôle de vie qui va émerger autour de la gare. Quand celle-ci a été créée en 1856, elle était complètement excentrée. «Les ingénieurs sont venus de Berne, ont tiré une ligne depuis Chexbres et ont dit: maintenant, la gare, c’est là, on ne peut pas la mettre ailleurs en raison de la déclinaison en direction de Genève, raconte ­Emmanuel Ventura. Ils ont donc créé cette plateforme distante de la ville.» 
C’est donc un nouveau centre urbain qui s’ajoute à plusieurs autres, dans une ville modelée par ses collines: du plus ancien, la Cité, au plus récent, le Flon, en passant par Bel-Air ou Saint-François. Non seulement l’architecture et les aménagements urbains se transforment autour de la gare, mais il est probable que les commerces des environs changeront aussi, attirés par ces nouveaux flux humains.

On peut imaginer que ce nouveau pôle urbain sera aussi attractif que le Flon. Mais il y a des différences majeures: il ne s’agit pas d’un projet commercial, et les projets autour de la gare sont développés par différents maîtres d’ouvrage dans des temporalités différentes.

Un concours pour la «tête de pont»
Pour Plateforme 10, le résultat, c’est que même à l’ouverture du bâtiment abritant le Musée de l’Élysée et le mudac, en novembre 2021, le quartier n’aura pas tout à fait son visage définitif. L’entrée côté gare, ce que le conseiller d’État Pascal Broulis appelle la «tête de pont», sera en chantier ou encore en attente d’une refonte. Ce 5 octobre, on en découvrira un aménagement presque définitif. «On va faire une grande allée, planter des arbres, réaménager la plaque tournante, et il y aura une fontaine tout prochainement», précise encore Emmanuel Ventura. 
Puis, un concours d’architecture sera lancé pour remplacer le poste directeur des CFF (ce vieux bâtiment qui reste à côté des rails et du MCBA), et tout l’accès à Plateforme 10. D’autre part, le bout d’immeuble situé en bas de l’avenue Ruchonnet, à l’angle, sera transformé pour laisser la place à des escaliers d’accès aux souterrains sous la place de la Gare. Emmanuel Ventura espère que tout ce secteur pourra être achevé vers 2024-2025.

Profiter des voyageurs
Il reste que Plateforme 10 bénéficiera évidemment de ce développement de tout le quartier. «La proximité de la gare est un atout énorme, affirme Chantal Prod’Hom, présidente du Conseil de direction. En sortant du troisième passage sous voies, à la pointe Ruchonnet, les gens seront quasiment sur le site ! Et les passagers qui descendent du train sur la voie 1 se retrouveront à un jet de pierre du Musée des Beaux-arts.»
L’enjeu sera donc de profiter de l’aubaine. «En 2026, selon l’agenda actuel des CFF, ce sont 200'000 personnes qui passeront par la gare de Lausanne chaque jour. Si l’on arrive à convaincre ne serait-ce que 1% des voyageurs de prendre le train suivant, et si on est malin, en proposant par exemple des visites du genre “Une demi-heure, une œuvre”, ça nous ferait déjà 2000 personnes par jour sur le site…» Plateforme 10 est en contact avec les CFF et compte bien pouvoir faire sa publicité à la gare. Tout cela reste à développer, en attendant le chantier. «Mais cette proximité, c’est un atout majeur pour nous, c’est quelque chose que beaucoup d’autres musées ou quartiers muséaux n’ont pas.»