Vaud à l'ère numérique
Supplément de la Feuille des avis officiels No 75-76 du 22 septembre 2017 Spécial économie vaudoise

Le canton se prépare à affronter la révolution 4.0

À l’exception du CHUV et des Écoles, Patrick Amaru, chef de la Direction des systèmes d’information (DSI), est en charge de toute l’informatique de l’administration cantonale. Il évoque les répercussions de la numérisation sur le Canton.
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Patrick Amaru, chef de l’informatique cantonale : « L’État doit tenir compte de la fracture numérique et maintenir par conséquent des prestations traditionnelles. »

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D’ici à 2020, Vaud proposera une soixantaine de prestations supplémentaires en ligne. Le site de l’état dans sa nouvelle forme sera accessible au printemps 2018.

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Le bouleversement de la société provoqué par le déploiement de l’informatique et la démocratisation d’internet et des réseaux sociaux aura des impacts importants. «Nous vivons une véritable révolution numérique, même si beaucoup préfèrent se contenter du terme “évolution”», souligne d’emblée le chef de la DSI, Patrick Amaru. Pourquoi le R qui précède est-il important ? «Parce qu’on se trouve actuellement devant des modèles disruptifs qui rompent totalement avec les anciens schémas. Prenez par exemple les plateformes communautaires Airbnb ou Uber, qui se sont développées très vite et qui ont révolutionné les habitudes dans plusieurs domaines d’activités», commente Patrick Amaru.

Trois axes

Pour le Canton, ces impacts de la numérisation ont été catégorisés selon trois axes. Le premier, c’est l’État pour lui-même, à savoir les métiers de l’État. «Ce dernier doit sans cesse revoir son fonctionnement, analyser comment se moderniser et reconsidérer ses prestations auprès du public.» La transition est déjà en cours depuis plusieurs années, par exemple dans le domaine de la fiscalité avec la possibilité de faire sa déclaration d’impôts par voie électronique (VauxTax) ou de changer son heure de rendez-vous en ligne au Service des automobiles et de la navigation. «À la différence de ce qui se passe parfois dans le secteur privé, l’État n’est pas dans des modèles disruptifs. Il doit tenir compte de la fracture numérique et maintenir par conséquent des prestations traditionnelles.» Ainsi, il est toujours possible de remplir sa déclaration d’impôts sur papier ou de se rendre au guichet pour obtenir diverses informations.

Le deuxième axe concerne l’État en tant que régulateur et législateur. «Son rôle est d’adapter les lois au fur et à mesure que de nouveaux modèles d’affaires apparaissent. L’État doit s’assurer qu’il y a un cadre législatif régulateur et adopter des normes valables pour tous», rappelle Patrick Amaru. Parmi les sujets de réflexion pour l’avenir figurent notamment la problématique de la taxation des robots ou l’intégration des modèles disruptifs dans notre système social avec, en point de mire, le respect des conditions de travail et la lutte contre la précarisation des travailleurs.
Le troisième axe, enfin, c’est celui de l’État garant des conditions-cadres en lien avec la numérisation. «Cela consiste à mettre en place une stratégie pour que les entreprises puissent évoluer sur un terreau fertile. De nombreux domaines sont concernés, telles les infrastructures, la gestion du territoire cantonal, l’économie ou la formation», énumère Patrick Amaru.

Protéger les données privées

La tâche est colossale et tentaculaire. Mais l’enjeu principal consiste encore et toujours à protéger les données privées. «Il y a souvent un décalage entre les souhaits d’une partie de la population et la nécessité de protéger les données. L’État doit y être très attentif. La technologie pourrait permettre une multitude de combinaisons – comme celles, par exemple, de réunir toutes les données sur un individu. Ce serait techniquement possible, mais c’est là que l’État intervient pour poser le cadre législatif qui garantira une protection adéquate des données», conclut le chef de la DSI.

Le site vd.ch en pleine mutation

En 2018, le site internet du canton de Vaud vd.ch apparaîtra sous ses nouveaux atours. Le futur portail, mieux conçu et au design rajeuni, sera visible sur tous les supports, de l’ordinateur au portable en passant par la tablette.
«La volonté est d’offrir un site plus orienté utilisateurs, dans lequel celui-ci trouvera facilement ce qu’il est venu chercher, à savoir, le plus souvent, des prestations», explique Cinzia Pfeiffer, chargée de projet web au Bureau d’information et de communication de l’État de Vaud. L’accent sera mis sur les prestations de service public et sur la manière de les obtenir. Un autre volet sera dédié aux  experts et aux professionnels. «Certains sujets intéressent plus les communes ou les journalistes qui ont besoin d’un contenu spécifique». 
Un des autres objectifs de ce vaste chantier est la simplification, que ce soit dans la navigation ou la manière de décrire les prestations. «On a parfois renoncé à être exhaustif pour privilégier la qualité du contenu. Nous devons faire en sorte que la formulation soit accessible à toutes et tous, en évitant les ambiguïtés et la surcharge d’information», signale Mme Pfeiffer. 
Pour élaborer ce nouveau site, les besoins des utilisateurs, évalués par des tests, la participation des services et des statistiques, ont été pris en compte. Les demandes concernent en règle générale les prestations. Les statistiques montrent que 90% des utilisateurs ne viennent chercher qu’une seule information, que 75% ne la trouvent pas immédiatement et que 85% de ces 75% finit par appeler le service concerné pour l’obtenir. Le site «nouvelle version» sera mis en ligne au printemps 2018. Il évoluera en fonction des demandes des utilisateurs.


Cyberadministration: ça avance

Après avoir réalisé un portail permettant aux communes d’utiliser des prestations sécurisées de l’Etat, d’accéder à des informations sensibles ou de les fournir, le Canton œuvre en ce moment à l’ouverture d’un portail sécurisé destiné, cette fois, aux entreprises. «Tout est tracé et suivi, pour un gain d’efficacité tant pour l’usager que l’administration», explique Sophie Pichaureaux, responsable du programme de Cyberadministration. «Cet espace sera mis à disposition en 2018, simultanément à la mise en ligne du nouveau site www.vd.ch

Dans la foulée, Vaud ouvrira un espace sécurisé pour les particuliers. «Il faudra s’identifier une fois physiquement afin de se faire délivrer un identifiant électronique, l’équivalent d’une pièce d’identité dans le monde numérique.»
Le but, à terme, c’est la dématérialisation, de manière à offrir des prestations électroniques à forte valeur ajoutée. Une demande de permis de construire, par exemple, pourra intégralement se faire en ligne, du dépôt de la demande à la délivrance de l’autorisation. Les guichets physiques ne disparaîtront pas pour autant, de manière à éviter la fracture numérique.